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Est-il possible de signer une convention de rupture conventionnelle individuelle avec un salarié alors même que la société rencontre des difficultés économiques ?
1. En théorie, une rupture conventionnelle peut intervenir alors même que la société rencontre des difficultés économiques
Par principe, une rupture conventionnelle individuelle résulte de la seule volonté des parties, sans qu’il y ait lieu d’en rechercher le motif.
Dans ces conditions, selon la Direction Générale du Travail, une rupture conventionnelle peut intervenir alors même que l’entreprise rencontre des difficultés économiques (Instr. DGT n°02 du 23.03.2010).
2. En pratique, rupture conventionnelle individuelle et difficultés économiques ne font pas souvent bon ménage
a) Son recours ne doit pas être un moyen de contourner les règles du licenciement économique collectif
Ce mode de rupture ne doit pas être un moyen pour l’employeur de se décharger de son obligation d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). À défaut, l’employeur s’exposera à 2 types de risques.
• Le risque de refus d’homologation de la convention
Le recours à des ruptures conventionnelles individuelles ne peut avoir pour objet ou pour effet d’éluder l’application du droit du licenciement collectif pour motif économique.
La rupture conventionnelle ne peut être utilisée comme un moyen de contourner les règles du licenciement économique collectif et donc de priver, de ce fait, les salariés des garanties attachées aux PSE. Ainsi, dès lors que le recours à la rupture conventionnelle concerne un nombre important de salariés et que cela a pour effet de priver ces salariés du bénéfice des garanties attachées aux licenciements collectifs, l’autorité administrative devra vérifier l’existence ou non d’un contournement des procédures de licenciement collectif justifiant un refus d’homologation de la rupture conventionnelle (Instr. DGT n°02 du 23.03.2010).
• Le risque de nullité des licenciements à venir, pour absence de PSE
En outre, l’homologation de quelques ruptures conventionnelles ne peut pas permettre d’éviter d’avoir à mettre en oeuvre, le cas échéant, un PSE pour les licenciements collectifs intervenant ultérieurement (Assemblée Nationale, Réponse du Ministre du Travail, question écrite N° 29982, JO du 03.09.2013).
Ainsi, si elles ont une cause économique et qu’elles s’inscrivent dans un processus de réduction des effectifs dont elles constituent la ou l’une des modalités, les ruptures conventionnelles devront être prises en compte pour déterminer la procédure d’information et de consultation des représentants du personnel applicable ainsi que les obligations de l’employeur en matière de PSE (Cass. Soc. 09.03.2011, N° 10-11.581 ; Cass. Soc. 19.01.2022, N° 20-11.962).
Les ruptures conventionnelles devront donc être prises en compte dans le calcul des seuils de déclenchement du PSE. À défaut, les licenciements ultérieurs pourraient être jugés comme étant nuls, pour absence de PSE.