Les entreprises qui procèdent à des licenciements collectifs pour motif économique peuvent être assujetties à une obligation dite de revitalisation des bassins d’emploi. Cette obligation permet d’accompagner les territoires affectés par des restructurations à travers un ensemble d’actions destinées à promouvoir l’émergence de nouvelles activités et la création de nouveaux emplois en remplacement de ceux supprimés par les licenciements collectifs.
1. L’assujettissement de l’entreprise à l’obligation de revitalisation des bassins d’emploi
Certaines entreprises peuvent être assujetties à une obligation de revitalisation des bassins d’emploi dès lors qu’elles procèdent à des suppressions de postes affectant par leur ampleur, l’équilibre du ou des bassins d’emploi dans lesquelles elles sont implantées.
1.1. Le champ d’application de l’obligation
Les dispositions qui suivent concernent les entreprises soumises à l’obligation de proposer un congé de reclassement. En d’autres termes, seules les entreprises et groupes d’au moins 1 000 salariés sont concernés.
Ces dispositions ne sont pas applicables aux entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire (L1233-84 du code du travail). A contrario, elles le sont dans les entreprises en sauvegarde (Circ. N° 2012-14 du 12.07.2012, relative à la mise en œuvre de l’obligation de revitalisation).
1.2. Des suppressions de postes
Les suppressions d’emploi peuvent résulter d’une procédure de licenciement collectif pour motif économique mais également de la conclusion d’une rupture conventionnelle collective. En effet, les sociétés qui ont recours à un accord portant rupture conventionnelle collective peuvent également être soumises à l’obligation de revitalisation des bassins d’emploi.
Dans tous les cas, le projet de suppression de postes doit concerner au moins 10 salariés.
1.3. Un déséquilibre sur le territoire concerné
La décision d’assujettir une entreprise à l’obligation de revitalisation du bassin d’emploi est prise par le préfet.
Pour ce faire, le préfet va regarder si le projet de suppression de postes affecte par son ampleur, l’équilibre du ou des bassins d’emploi concernés.
Il va notamment prendre en compte le nombre et les caractéristiques des emplois susceptibles d’être supprimés, le taux de chômage, les autres restructurations et suppressions d’emploi intervenues au cours des 2 dernières années, les caractéristiques socio-économiques du ou des bassins d’emploi et les effets du licenciement sur les autres entreprises de ce ou ces bassins d’emploi (D1233-38 du code du travail).
Il peut également demander à l’entreprise de réaliser une étude d’impact social et territorial.
2. Le délai d’instruction
Le préfet dispose d’un délai de 2 mois pour dire si l’entreprise est soumise à l’obligation de revitalisation des bassins d’emploi. Ce délai court à compter de la notification par la Direccte (la DREETS) de la décision de validation ou d’homologation du PSE (D1233-38 du code du travail).
Dans le cadre d’un accord portant rupture conventionnelle collective, le délai court à compter de la décision administrative de validation de l’accord.
La décision d’assujettissement intervient après avoir recueilli les observations de l’entreprise. Cette décision est susceptible de recours.
3. La mise en œuvre de l’obligation de revitalisation
Pour satisfaire à son obligation, l’entreprise peut soit signer un accord collectif soit conclure une convention avec l’Etat.
L’entreprise dispose d’un délai d’un mois à compter de la notification de la décision d’assujettissement pour informer le préfet de sa décision (D1233-39 du code du travail).
3.1. La signature d’un accord collectif
Un accord collectif (de groupe, d’entreprise ou d’établissement) peut tenir lieu de convention.
En cas de recours à un accord collectif, l’entreprise doit également transmettre au préfet la copie de cet accord, son récépissé de dépôt et l’ensemble des informations, notamment financières, permettant d’évaluer la portée des engagements y figurant (D1233-39 du code du travail).
Le préfet peut former opposition à cet accord dans les deux mois suivant la demande (L1233-85 du code du travail).
3.2. La signature d’une convention avec le préfet
L’entreprise peut décider de signer une convention avec l’Etat, représenté par le préfet. Dans ce cas, un processus de négociation va s’engager.
La convention devra ensuite être conclue dans un délai maximum de six mois à compter de la notification du projet de licenciement collectif à la Direccte (la DREETS) prévue à l’article L1233-46 du code du travail (L1233-85 du code du travail).
La convention de revitalisation fixera l’engagement de l’entreprise et déterminera la nature, ainsi que les modalités de financement et les mesures mises en œuvre dans le cadre de cette revitalisation.
Ainsi, la convention comportera notamment (D1233-40 du code du travail) :
1° Les limites géographiques du ou des bassins d’emploi affectés par le licenciement collectif (ou par la rupture conventionnelle collective) et concernés par les mesures qu’elle prévoit ;
2° Les mesures permettant la création d’activités, le développement des emplois et l’atténuation des effets du licenciement envisagé (ou de la rupture conventionnelle collective) sur les autres entreprises dans le ou les bassins d’emploi concernés, ainsi que, pour chacune d’entre elles, les modalités et les échéances de mise en œuvre et le budget prévisionnel et, le cas échéant, le ou les noms et raisons sociales des organismes, établissements ou sociétés chargés pour le compte de l’entreprise de les mettre en œuvre et les financements qui leur sont affectés ;
3° La durée d’application de la convention qui ne peut dépasser trois ans, sauf circonstances particulières ;
4° Le montant de la contribution de l’entreprise par emploi supprimé et le nombre d’emplois supprimés ;
Le montant de la contribution versée par l’entreprise ne peut être inférieur à deux fois la valeur mensuelle du salaire minimum de croissance (SMIC) par emploi supprimé. Toutefois, l’autorité administrative peut fixer un montant inférieur lorsque l’entreprise est dans l’incapacité d’assurer la charge financière de cette contribution (L1233-86 du code du travail).
5° Les modalités de suivi et d’évaluation des mesures mises en œuvre.
Au cours du processus de négociation, le préfet consultera avec l’entreprise, les collectivités territoriales intéressées, des organismes consulaires1Tels que la chambre de commerce et d’industrie, la chambre d’agriculture, la chambre des métiers. et des partenaires sociaux membres de la commission paritaire interprofessionnelle régionale (L1233-88 du code du travail). Les maisons de l’emploi pourront aussi participer à la mise en oeuvre des mesures relatives à la revitalisation des bassins d’emploi (L1233-90 du code du travail).
4. Le suivi et l’évaluation de la mise en œuvre de la revitalisation des bassins d’emploi
La mise en œuvre de la revitalisation des bassins d’emploi fait l’objet d’un suivi et d’une évaluation par un comité présidé par le préfet.
Ce comité se réunit au moins une fois par an, sur la base d’un bilan, provisoire ou définitif, transmis préalablement par l’entreprise au préfet (D1233-42 du code du travail).
✏️ À noter : un décret n° 2023-553 du 1er juillet 2023 précise les modalités de mise en œuvre des conventions locales de revitalisation. Ce texte porte à 2 mois (contre 1 auparavant) le délai dans lequel les préfets indiquent à l’entreprise si elle est soumise à l’obligation de revitalisation des bassins d’emploi à compter de la date d’homologation ou de validation du plan de sauvegarde de l’emploi ou de la rupture conventionnelle collective. Il précise également les critères à apprécier à ce titre, la portée de la décision d’assujettissement à cette obligation de revitalisation des bassins d’emploi sur la procédure d’élaboration d’une convention-cadre nationale de revitalisation, ainsi que les modalités de valorisation de la cession d’un bien immobilier pouvant être pris en compte dans le cadre de la convention de revitalisation. Il prévoit enfin les modalités relatives aux conventions-cadre nationales de revitalisation.